Le Moyen Age. Mesurer la Terre .

 

C’est le géographe grec d’Alexandrie, Ptolémée (90-168), qui fixe, dans son Guide géographique en huit livres et 27 cartes, l’image du monde qui sera celle des Occidentaux pendant près de treize siècles. Si tous les originaux ont disparu, les cartes de Ptolémée ont été copiées et recopiées à satiété. Ses nouveaux calculs de la circonférence terrestre sont entachés de graves erreurs (il l’évalue à 28 400 km), sous-estimant les longitudes. Erreur bénéfique à long terme, qui évita à Christophe Colomb d’être découragé d’avance par l’étendue réelle de l’océan Atlantique, lorsqu’il partit vers l’ouest pour chercher l’Inde !

Le Moyen Age chrétien s’attache à l’interprétation littérale des livres saints, et n’a que faire des notions acquises sur la Terre.

Les oeuvres cartographiques qu’il nous a laissées n’ont pas de destination pratique, elles ne visent pas à la représentation exacte de l’univers connu. Illustrant des livres religieux, elles sont une évocation du monde révélé. La carte médiévale, la mappemonde, a donc un caractère mystique et symbolique. Au-delà de ces conceptions mystiques, des savants admettent l’existence d’une terre habitable, isolée de la leur par une zone torride. Conjointement, les cartographies à grande échelle, de type cadastre, se perpétuent pour établir les propriétés et les impôts. Le monde scientifique est en contact avec les Arabes, dépositaires des cultures grecque et orientale, chinoise en particulier. Le plus grand géographe arabe est al-Idrisi (1099-1164) ; grand voyageur installé à Palerme, il y fonda une école. Il nous a laissé une géographie descriptive, Les Récréations de celui qui aspire à parcourir le monde, accompagnée de 70 cartes. Aux Chinois il emprunte le placement du nord... au bas de la carte !

De leur côté, les Italiens, qui dominent le commerce terrestre et maritime, ne nous ont pas laissé de traces de leurs connaissances des terres orientales sous forme graphique (le Livre des Merveilles de Marco Polo est une oeuvre littéraire), mais ils ont produit la majeure partie des « portulans ». Ces cartes, destinées aux navigateurs, décrivent et positionnent les ports. Elles sont basées sur des directions données par la rose des vents, attestant ainsi l’usage de la boussole. Le nord, point désigné par celle-ci, prend alors place en haut de la carte.

 

 

Le désenclavement planétaire et ses conséquences.

 

Grâce aux progrès techniques comme le gouvernail d’Etambot, le bordage à clin, l’astrolabe et l’élaboration des portulans, les grandes découvertes du XYe siècle transforment radicalement la vision des Européens sur le monde. Elles constituent également une émulation pour les savants qui tentent de dresser des cartes précises utiles aux navigateurs. Espagnols et Portugais, partis dans des directions opposées, cherchent l’Inde et la Chine, les uns en traversant l’Atlantique, les autres en contournant l’Afrique. Le voyage de Magellan ayant définitivement prouvé la sphéricité de la Terre, il reste à mettre le monde courbe à plat par des systèmes de projection. Autre casse-tête !

Les cartes du XYIe siècle montrent que les Occidentaux connaissent désormais le monde dans les grandes lignes. Par contre, les théories scientifiques sur le système de l’Univers constituent un bouleversement majeur. Le système copernicien marque la fin du géocentrisme. Désormais, le Soleil occupe le centre du système (héliocentrisme) ; la Terre n’est plus qu’une planète qui tourne sur elle-même en 24 heures et autour du Soleil en une année. Même si ces thèses sont condamnées, si Galilée doit abjurer, l’idée finit par s’imposer. La représentation du monde commence alors à s’émanciper de la représentation symbolique d’un monde créé par Dieu. Cependant, alors que les principes du calcul de la latitude sont connus très tôt (grâce à l’astrolabe inventé par les Grecs, perfectionné par les savants arabes et utilisé en mer à la fin du XYe siècle), il faudra encore de longues années (deuxième moitié du XYIIIe siècle) avant de se repérer précisément à la surface du globe et de déterminer la position d’un lieu à l’aide du calcul de sa longitude, grâce à l’invention des horloges marines par l’Anglais John Harrison.